La santé est trop bon marché

Résolis est actif dans le maintien à domicile des personnes âgées sur le Littoral neuchâtelois depuis 7 ans. Rencontre avec son directeur, Jean-Luc Chevance, qui pousse un cri d’alarme face à la pénurie de personnel qui frappe de plein fouet le secteur de la santé.

Pouvez-vous nous présenter Résolis?

Nous intervenons pour le maintien à domicile des personnes âgées sur le Littoral ainsi qu’aux Hauts-Geneveys. Certains bénéficiaires présentent des handicaps physiques ou psychiques, une perte de mobilité ou des déficiences cognitives qui les fragilisent et les rendent dépendants. Notre but est de leur apporter une prise en charge globale leur permettant de continuer à vivre à la maison dans de bonnes conditions.

Vous offrez uniquement des prestations paramédicales?

Notre offre est plus vaste, puisque nous proposons des aides à domicile pour faire le ménage, les courses, la lessive ou encore des massages thérapeutiques. Notre action se base sur une évaluation personnalisée des besoins des personnes âgées.

En tant qu’acteur de soins à domicile, quel regard portez-vous sur ces dernières années?

Chez Résolis, nous sommes partis d’une feuille blanche pour proposer des prestations de qualité grâce aux excellentes compétences de nos collaborateurs. Notre principale difficulté? Cela reste le recrutement de personnel. Nous traversons actuellement une période de pénurie et les perspectives sont encore plus sombres. Je suis extrêmement inquiet pour l’avenir. Il y a 20 ans, la CCT santé 21 est née de la forte rotation du personnel qualifié et de la fuite des compétences vers d’autres cantons plus attractifs. Aujourd’hui le marché est à sec; le personnel abandonne la profession par manque de reconnaissance et lassitude.

Quelles en sont les raisons?

Il y a d’abord l’aspect sociologique. Le vieillissement de la population nécessite plus de mains d’œuvre qualifiée. Mais au risque de vous surprendre, le principal problème est que la santé est trop bon marché. Quand vous mettez votre voiture au garage, vous payez CHF 130.- de l’heure le travail à l’atelier. Dans le secteur des soins à domicile, nous facturons en moyenne moins de CHF 60.- de l’heure les soins d’une infirmière qualifiée. Cela vous semble logique?

Que proposez-vous pour faire évoluer cette situation?

Nous devons changer de paradigme et trouver de nouvelles voies de financement. La Santé doit être reconnue comme un bien sociétal au même titre que l’Education ou la Sécurité. Les assurances ne peuvent pas, à elles seules, financer les coûts. La santé ne dépend pas uniquement de facteurs intrinsèques à chaque assuré mais dépend également de facteurs environnementaux ; la pandémie de Covid 19 en est un bon exemple. Les politiciens ont une grande responsabilité et doivent prendre des décisions courageuses en ce sens. Mais le premier pas est d’admettre que la santé a un prix. Nous ne pouvons pas nous réjouir de vivre plus longtemps en bonne santé et ne pas vouloir payer les soins à leur juste valeur. Je ressens de mon côté une grande lassitude du personnel soignant. Si nous ne trouvons pas rapidement de solutions au niveau politique, nous fonçons dans le mur.