L’enjeu des EMS ? Mettre des soins dans un lieu de vie. Pas l’inverse.

Gaël Del Egido

Interview de Monsieur Gaël Del Egido, directeur de l’EMS Bellevue au Landeron

Pouvez-vous nous présenter votre EMS en quelques phrases?

Notre établissement compte 37 résidents en long-séjour pour environ 60 collaborateurs. À temps complet, cela correspond à 37 postes de travail. Le calcul est donc simple, la gestion d’un EMS comme Bellevue, c’est un employé par résident. Dans notre institution, tout un monde se croise et collabore chaque jour. Du personnel de soins, des collaborateurs en animation socio-culturelle, des cuisiniers, du service technique ou du personnel d’entretien, sans oublier les fonctions administratives.

Comment vivez-vous cette crise sanitaire?

La Covid met notre établissement à rude épreuve, même si nos résidents ont échappé à la contamination jusqu’à présent. La principale difficulté, lors de la première vague, a été l’adaptation régulière de nos règles sanitaires face à l’inconnu de la maladie. Nous devions constamment changer notre dispositif. Nous avons aussi été rapidement confrontés à une nécessaire évaluation des risques. Nous voulions protéger nos résidents, mais également préserver leur qualité de vie. Nous suivons donc, encore actuellement, des normes de protection très strictes vis-à-vis de l’extérieur et restons souples dans notre organisation interne.

Vous vous êtes donc un peu coupés du monde?

Nous nous sommes en effet coupés du monde extérieur afin de garder nos activités et notre vie. Les résidents continuent, par exemple, de manger ensemble, de faire des balades dans notre parc et de participer aux activités. Nous avons par contre très strictement encadré les visites et les contacts avec l’extérieur. Le bilan après une année ? Cela a bien fonctionné et nous le devons à notre personnel qui s’est montré disponible et très impliqué. Cette stratégie ne peut fonctionner que si le virus reste dehors. Les collaborateurs ont donc dû être très vigilants dans leur vie privée. Et, il faut aussi l’admettre, il existe toujours une part de chance…

Comment avez-vous vécu cette période en tant que directeur?

J’ai passé beaucoup de temps avec les résidents et les équipes. Comme de nombreux dossiers ont été « gelés » le temps du Covid, je me suis concentré sur l’humain et j’ai passé beaucoup de beaux moments de partage avec tout le monde. Mais il faut rester lucide : je ressens actuellement une lassitude, une fatigue et une forte envie de s’ouvrir au monde extérieur. Tout le monde a besoin de passer à autre chose, même si cela ne semble pas pour tout de suite.

Excepté le Covid, quel est le dossier actuellement sur votre bureau?

C’est évidemment la rénovation de nos infrastructures. Nous ne désirons pas juste rafraîchir nos locaux, mais les adapter à une nouvelle philosophie de soins et d’accompagnement. En résumé, nous ne voulons pas mettre de la vie dans un lieu de soins, mais des soins dans un lieu de vie. C’est, selon moi, l’enjeu d’un EMS au XXIe siècle. La réflexion architecturale doit prioritairement s’organiser sur la vie d’une personne âgée en communauté. Le résident doit être au centre de nos préoccupation. Voilà un défi à plus long terme que je me réjouis de relever et qui me permet de pas uniquement penser à la crise sanitaire.